Ce matin, sur Europe 1, la voix que j’entendais m’a soudain réveillée : le Père Pedro !!!
Alors il est temps que je vous parle de lui ! Puisque la vie du Père Pedro, c’est Antananarivo et Madagascar, et qu’il est à l’origine d’une des plus terribles expériences de ma vie – je l’avais évoqué dans mes premières impressions sur Antananarivo – !
De retour de … Madagascar
Le Père Pedro est en ce moment en tournée en France pour récolter des fonds pour l’association Akamasoa lancée en décembre 1989. Pour cette 10e tournée, son mode d’intervention est bien rodé : en conférence, le soir dans des salles pleines pour expliquer son action et à la rencontre des élus ou des médias durant la journée pour plaider la cause de Madagascar.
Qui est le Pere Pedro
Le Père Pedro fait partie de la congrégation de St Vincent de Paul. L’homme à l’impressionnante barbe blanche parle couramment 6 langues et un français parfait.
D’origine slovène, Pedro Opeka est né en 1948 et a grandi à Buenos Aires, en Argentine.
Il y a appris, lui l’ainé de 8 enfants, à devenir maçon dès l’age de 9 ans avec son père et à l’age de 17 ans, il bâtissait sa 1ere maison pour des indiens de la Cordillère des Andes
« un homme doit avoir un métier »
C’est en 1975 qu’à 27 ans il est ordonné prêtre à à Buenos-Aires et qu’il part pour Madagascar dont il a fait depuis 40 ans sa terre d’adoption, ou il lutte contre la pauvreté. Le Père Pedro EST par son action.
Après 15 années passées dans la brousse ce pays « accueillant, joyeux et d’une beauté extraordinaire », il arrive à Tananarive et, dans l’impossibilité de fermer les yeux, il a été pris d’une « sainte colère » et a décidé de
« mettre debout les gens »
Et donc il y a 25 ans, en 1989, il a créé l’association Akamasoa – prononcer Akamassou et qui signifie « Les bons amis » en malgache – : avec des équipes constituées peu à peu, il a aidé à sortir de la misère quelques 500 000 personnes.
Mais avec une seule règle : « les pauvres sont les acteurs de leur développement ».
C’est donc avec les plus pauvres d’entre les plus pauvres – 9 malgaches sur 10 vivent sous le seuil de pauvreté avec moins de 1 $ par jour – qu’il a bâti des maisons pour les familles, une trentaine d’écoles, des terrains de sports, des établissements de soins …) en lieu et place d’une décharge de la banlieue d’Antananarivo où, au départ, humains et animaux se disputaient des restes alimentaires parmi les ordures d’une décharge. Et c’est en allant vivre au milieu de ces familles sur la plus grande décharge de la ville car
« on ne lutte contre la pauvreté qu’au milieu des pauvres et avec eux ».
Aujourd’hui ce sont 18 villages répartis sur la grande ile pour lesquels il a contribué à construire ainsi.
Une de ses plus grandes réussites est, selon lui, d’être aujourd’hui entouré par 460 Malgaches (médecins, techniciens, assistantes sociales…) – dont plus de la moitié issue de cette décharge – qui l’aident dans son action de terrain dans ce pays où 60 % des habitants ont moins de 15 ans.
Et le Père Pedro aime le foot – encore aujourd’hui il joue sur le terrain à Tananarive – et s’intéresse à la coupe du monde mais avec une opinion bien arrêtée qui est toute sa philosophie de combattant : « Je n’aime pas les passes en arrière. On attaque. » Père Pedro pense que « pour arracher les enfants à la rue, il faut faire du sport. » parce que c’est « l’effort, le combat et vivre en équipe »
Et ce combat, il le mène pour les milliers d’enfants pour lesquels « il ne faut pas baisser les bras« . Les écoles d’Akamasoa, ce sont 12 000 enfants scolarisés, qui lui ont permis d’ailleurs de créer une partie de l’équipe qui l’entoure. Et c’est aussi pour eux « qu’il ne rentre jamais les mains vides » de ces tournées de collecte internationale. Et pourtant il ne semble être qu’un moyen lorsqu’on l’écoute : « avec Akamasoa, on a créé une ville, on accueille les sans-abri, on a donné du travail à des milliers de personnes, on a construit des logements. Il y a aussi les soins, la crèche, les écoles, un accueil pour les personnes en fin de vie, l’assainissement, l’énergie… Tout cela avec les gens. Avec les pauvres et au milieu d’eux. Ce n’est pas quelque chose qui est tombé du ciel, c’est eux qui l’ont fait. Moi, je cherche les moyens. Ils ont construit cette ville. Là, il y a une fierté, un bonheur, une reconnaissance. »
Il parvient aussi à aider ponctuellement environ 30 000 personnes par an – soins, habits, outils – et les incite à rentrer dans leurs villages, à fuir cette capitale qui ne peut rien leur apporter.
Le père Pedro les connaît
Les nouveaux dirigeants de Madagascar élus en janvier 2014 : il s’exprime peu sur le coté politique mais pense que depuis l’indépendance en 1960, Madagascar n’a fait que descendre. En 1970, à son arrivée, il y avait 6 millions d’habitants avec 30 % de pauvreté et 2014, il y en a 23 millions et on parle de 80 % de pauvreté. « C’est l’espoir qui renaît à chaque nouveau gouvernement. C’est l’espoir du retour de l’aide internationale » qui s’était interrompue depuis la prise de pouvoir de 2009.
Le pape François : « Nous avons fait la même fac de théologie, j’arrivais quand il partait et nous nous sommes croisés dans les couloirs« . « Je suis heureux que celui qui défend les plus pauvres soit au plus haut sommet de l’Église« .
La crise : le père Pedro pense que si nous disons que nous sommes en crise, alors « je dis Inventez un mot pour nous. Si vous êtes en crise avec votre pouvoir d’achat, vos voitures, vos autoroutes goudronnées… Nous c’est la survie ! À Madagascar, nous n’avons même pas une route du nord au sud. »
Les Français : il est frappé de la générosité des Français qui selon lui aident beaucoup d’associations sans se lasser. Et pour lui, « les Français sont généreux quand ils savent que l’argent arrive à destination« . Et les nombreux touristes français qui vont à Madagascar racontent ensuite ce qu’ils ont vu.
La messe du Père Pedro
Mon immense regret est de n’avoir pu assister à la messe dans le quartier du Père Pedro. En effet lors de mon passage, lui avait repris son bâton de pèlerin pour collecter des fonds.
Mais tous m’en ont parlé : des malgaches, la sœur Yvette qui le connait bien, des français ayant voyagé a Madagascar et dont certains ont pu assister à cette messe !
La messe, qui dure pratiquement 3 heures, est extraordinaire, dans un hall omnisports toujours comble.
Il y a du spectacle :
nombreux chants interprétés par plusieurs chorales,
musiciens populaires (dont des accordéonistes !)
et diverses chorégraphies pour accompagner l’évangile ou le pain et le vin depuis le fond de l’église jusqu’à l’autel. Des groupes d’enfants en costumes de couleurs différentes (ah, le charme des jupes froncées des gamines avec une couleur par âge !) évoluent en chantant et dansant. Quand un chant est lancé, c’est au moins avec 20 couplets. C’est terriblement émouvant et impossible à rapprocher de nos liturgies frileuses.
Pour en savoir plus
« Akamasoa et le père Pedro », une vidéo pour voir :
un aperçu de la messe
des images de la vie quotidienne malgache et du peuple des villages d’Akamasoa
vous entendrez
le récit de quelques aventures individuelles
et la confiance inébranlable que le père Pedro a dans l’être humain.
« Il faut agir. Celui qui ne travaille pas ne mange pas ». Ne vous y trompez pas, dans cette video, travailler c’est faire le linge, a manger pour tous, mais c’est aussi travailler dans la carrière, dans un atelier de menuiserie, réparer les routes …
Regardez les videos ci dessus et vous ne pourrez plus jugez avec vos yeux d’européen mais avec ceux qui regardent des hommes et des femmes remis debout par un travail aussi dur soit-il : « Ces femmes la sont des dames », pas de machines car « Que feraient ces gens la ? Ces gens la travaillent. Ils font partie de la société. Ils sont fiers. Ils ont un honneur. Ils peuvent être devant toutes les personnes debout »
Et mon expérience personnelle sera dans mon prochain post.
Des livres et des sites sur le Père Pedro
« Akamasoa, rêves d’enfants, 25 ans d’action du Père Pedro » (aux éditions du Rocher).
Pierre Lunel – qui fut le confident de l’abbé Pierre et de Soeur Emmanuelle – a signé les textes de ce beau livre de témoignages racontant l’engagement exceptionnel du religieux à Madagascar.
Les photographies sont de Rijasolo, photojournaliste correspondant de l’AFP à Madagascar.
Pourquoi Patrick Poivre d’Arvor signe la préface ? Dans cet ouvrage, PPDA évoque sa rencontre avec le Père Pedro il y a plus de vingt ans alors qu’il préparait sa première interview pour son émission Ex-Libris. PPDA invite aussi les lecteurs à entrer, par le biais de ce livre, dans «la demeure d’un géant».
Sites pour infos ou pour faire des dons à l’association sur
le site des amis du Père PEDRO
Mots clés qui ont permis aux internautes de trouver mon article :
- joie de vivre chez le père pedro à tananarive (1)